Molière

Oeuvres communes:

- Les Fâcheux 1661
- Le Mariage Forcé 1664
- La Princesse d'Elide 1664
- L'Amour Médecin 1665
- La Pastorale Comique 1667
- Le Sicilien 1667
- Georges Dandin 1668
- Monsieur de Pourceaugnac 1669
- Les Amants Magnifiques 1670
- Le Bourgeois Gentilhomme 1670
- La Comtesse d'Escarbagnas 1671
- Psyché 1671

Jean-Baptiste Poquelin naquit à Paris le 15 janvier 1622. Il fit de brillantes études tout d'abord au Collège de Clermont, devenu aujourd'hui le lycée Louis le Grand, puis à l'Université de philosophie et de droit. Il participa certainement aux réunions du philosophe libertin Gassendi, que fréquentaient déjà Bernier, Cyrano de Bergerac et Chapelle.
En 1637, il reçut de son père la survivance de la charge de tapissier du Roi. Mais sensibilisé à l'art de la scène, grâce à sa rencontre avec Sacaramouche, il choisit de devenir comédien et abandonna la charge transmise par son père. En 1643, Molière et Madeleine Béjart, devenue sa maîtresse, signèrent l'acte d'association, fondateur de l'Illustre Théâtre. Après quelques jours, passés en prison pour cause de dettes, Molière quitta Paris pour parcourir les routes de France, pendant 14 ans. L'auteur qu'il était, bénéficia de son expérience d'acteur et de directeur de troupe. Molière étudia la concurrence que représentaient les troupes italiennes interprétant la commedia dell'arte à Lyon. Il écrivit alors des farces telles que "Le Médecin Volant", "L'Etourdi" ou "Le Dépit Amoureux".
A son retour à Paris en 1658, Il trouva la protection de Monsieur, frère du roi. Le Roi ordonna que la troupe s'installe au Petit-Bourbon. Molière y créa "Les Précieuses Ridicules", "Sganarelle ou le Cocu Imaginaire".
Sa première comédie-ballet fut "Les Fâcheux", représentée lors de la fête donnée en aout 1661 par Fouquet à Vaux-le-Vicomte pour la visite du roi. La musique fut composée par Beauchamp, mais Lully y signa une "Courante".
Clin d'oeil à Lully dans le texte de Molière:

Baptiste le très cher,
N'a point vu ma courante, et je le vais chercher.
Nous avons pour les airs de grandes sympathies
Et je veux le prier d'y faire des parties.

Le jeune Louis XIV ne tarda pas à être séduit par l'humour du comédien. Le succès de "L'Ecole des Femmes" (1662) valut à Molière une pension de mille livres accordée par le roi.
Suivirent ensuite "L'Impromptu de Versailles" (1663) et la comédie-ballet "Le Mariage Forcé" conçue avec la musique de Lully. "Tartuffe", donné lors des "Fêtes de l'Ile Enchantée" avec "La Princesse d'Elide", puis "Dom Juan" tombèrent sous le sceau de la censure étatique. Mais Louis XIV manifesta tout son appui à Molière en le nommant "Chef de la Troupe du Roi".
Les pièces "le Misanthrope", "Le Médecin malgré lui", "Amhitryon", "L'Avare", "Les Fourberies de Scapin" ou "Les Femmes Savantes" sont autant de comédies peignant la société du XVIIème siècle avec un humour féroce.
Molière, dont la famille maternelle (les Mazuel) comportait de nombreux musiciens, sut mêler habilement la comédie à la musique et à la danse.

Molière lançait parfois à son complice:

"Lully, fais-nous rire!"


Molière et Lully sur scène.

C'est là qu'intervint Lully avec lequel Molière écrivit de nombreuses comédies-ballets : "L'Amour Médecin", "Pastorale Comique", "Le Sicilien ou L'Amour-peintre", "Georges Dandin", "Monsieur de Pourceaugnac", "les Amants Magnifiques", "Le Bourgeois Gentilhomme".
Leur amitié fut certainement sincère. Ils partagèrent la même scène pour échanger des répliques désopilantes. Molière, dans le rôle de Monsieur Jourdain face à Lully en Grand Muphti, dans "Le Bourgeois Gentilhomme" restera dans l'histoire! Molière prêta dix mille livres à Lully, pour que celui-ci puisse construire son hôtel rue Ste-Anne, somme que le musicien remboursa jusqu'au dernier centime, même après le décès de Molière.


Signatures de Molière, Lully et sa femme au bas de l'acte de prêt conclu pour la construction de l'hôtel de la rue Ste-Anne.

Une anecdote amusante:
Molière avait invité quelques amis dans sa maison à Auteuil, dont Chapelle et Lully. Mais, indisposé, il se retira en début de soirée, laissant ses compères autour de bonnes bouteilles... L'hôte fut réveillé dans la nuit par ses domestiques apeurés. Ses invités s'étaient laissé aller à une philosophie imprégnée de vapeurs d'alcool. Ils étaient désormais convaincus que la vie ne valait pas la peine d'être vécue et s'apprêtaient à plonger dans la rivière la plus proche pour s'y noyer. Les ivrognes poursuivirent, l'épée à la main et jusque dans la maison, les domestiques qui tentaient de les tirer hors de l'eau! Après de longues tractations, Molière réussit à repousser l'échéance au lendemain matin. Une fois dégrisés, les amis renoncèrent, bien entendu, à leur projet.

La tragédie-ballet "Psyché" pour laquelle Molière collabora avec Corneille et Quinault marqua un pas de plus vers l'opéra français, qui n'existait pas encore.

Les rapports entre Lully et Molière se dégradèrent peu à peu. Le musicien supportant de moins en moins sa situation précaire. En effet, Molière disposait déjà de la salle du Palais Royal, dans laquelle il donnait ses pièces et les comédies-ballets. Sa situation financière était aisée.
De son côté, Lully, Surintendant de la Musique de la Chambre, n'avait aucune de salle de spectacle à sa disposition. Les musiciens qu'il dirigeait appartenaient au roi. Il découvrit d'autant plus que le public français était susceptible d'apprécier un spectacle entièrement chanté, grâce au succès de "Pomone", premier opéra français donné en France.
Pour certains, Molière nourrissait l'espoir de racheter lui-même le privilège de l'opéra, après le succès très encourageant de "Psyché". Toujours est-il que Lully fut plus rapide et trouva surtout l'approbation du roi.

Le rôle de Colbert fut important dans les manoeuvres opérées. Le Contrôleur Général des Finances avait soutenu Perrin lors de son acquisition du Privilège de l'Opéra en 1669. Mais ce dernier, pris aux mains de deux escrocs: Sourdéac et Champeron, qui refusaient de partager le produit des recettes de "Pomone", se retrouva en prison pour dettes.
Colbert, embarrassé par une situation qu'il avait lui-même engendrée, suggéra alors à Lully de racheter ce privilège.
Lully écrivait à Colbert le 3 juin 1671 :
"Vous savez, Monseigneur, que je n'ay pris d'autre route dans cette affaire que celle que vous m'avez prescritte (...)"
Fort de l'appui de Madame de Montespan et de Colbert, Lully alla plaider sa cause auprès du roi. Sensible aux arguments du florentin, le monarque lui accordait le privilège le lendemain.

Dans la rédaction de l'ordonnance royale, l'interdiction de toute représentation de plus de deux airs et de deux instruments dans tout le royaume visait à empêcher toute autre forme d'opéra, que ce soit opéra italien ou tragédie-machines.
En outre, l'ordonnance précise bien que les musiciens employés pour les représentations données à la Cour, ne devaient pas être utilisés pour les spectacles donnés à Paris. Lully devait donc autofinancer ses opéras. Il chercha donc à écarter toute concurrence dans le royaume, afin de rentabiliser l'investissement énorme qu'avait été le rachat du Privilège de l'Opéra.

Dès mars 1672, Molière obtint une dérogation à l'ordonnance royale. Son théâtre bénéficia d'un traitement de faveur avec la permission d'élargir ses effectifs à 12 violons, 12 danseurs, 3 symphonistes, et 7 musiciens. Molière put ainsi continuer à jouer "Psyché" au Palais Royal avec la musique de Lully sans rétribution. De son côté, Lully fit représenter dans sa toute nouvelle salle "Les Fêtes de l'Amour et de Bacchus", composées des comédies-ballets, sans que le nom de Molière ne paraisse. Molière multiplia aussi les "impolitesses" envers son ami.
En juillet 1672, il décida de représenter "La Comtesse d'Escarbagnas" devant le public parisien, non pas avec "le Ballet des Ballets" composé par Lully initialement prévu, mais avec une ouverture de M.A. Charpentier. Il donna également "Le Mariage Forcé" en remplaçant les intermèdes de Lully par de nouveaux composés par M.A. Charpentier.

Molière mourut à l'issue de la quatrième représentation du "Malade Imaginaire" (musique de Charpentier), le 17 février 1673.

Répands, charmante nuit, répands sur tous les yeux
De tes pavots la douce violence,
Et ne laisse veiller en ces aimables lieux
Que les coeurs que l'Amour soumet à sa puissance.
Tes ombres et ton silence,
Plus beaux que le plus beau jour,
Offrent de doux moments à soupirer d'amour.

Monsieur de Pourceaugnac.



Pour en savoir plus :

Site Molière

Molière

Molière - Oeuvres complètes
- en 4 tomes, Editions GF-Flammarion, livre de poche / 2000
- Gallimard / 1988
- Robert Jouanny, Garnier Freres
- Seuil

Theatre complet
Impr.nationale, Pierre Malandain / 1998

Bibliographie des oeuvres de Molière publiées au XVIIème siècle
A.-J. Guibert, Paris, CNRS / 1961

Molière et ses comédies-ballets
Charles Mazouer, Paris, Klincksieck / 1993

"Musical Practices in the Theater of Molière"
Revue de Musicologie, t. 82, p.5 à 37 / 1996

Die "Comédie-Ballet" von Molière-Lully
Böttger, Friedrich / Olms / 1979

Music, dance and laughter : comic creation in Molière's comedy-ballets
Fleck, Stephen H / Papers on French seventeenth century literature / 1995

Thèse : Molière et les arts ou les comédies sous les regard des Muses.
Nom de l'auteur : Clément Rachel
Date d'enregistrement : 1997/10
Numéro de thèse : 9805167P
Université Grenoble III

Thèse : Molière et la fête royale.
Nom de l'auteur : Ebana Ter Uaki
Date d'enregistrement : 1987/12
Numéro de thèse : 8800479M
Université Paris IV


Retour
Sommaire