Bienvenue sur le Site Lully : Rayonnement lullyste

La France, nouvelle patrie du Florentin


Un artiste populaire

L'impact de la musique de Lully fut énorme dans les esprits avant tout. Ce succès populaire s'explique par le fait que l'oeuvre de Lully est composée de mélodies raffinées et distrayantes. On fredonnait les airs de ses opéras dans les rues. Témoignage de l'époque : "L'on raconte qu'il faisait parfois arrêter son carrosse au Pont-Neuf, pour donner le ton au chanteur et au violon qui exécutaient ses pièces". L'air de Vénus dans le prologue de Thésée "Revenez, Amours, revenez" fut considéré tout au long du XIXe siècle comme le type d'air "classique" français des plus appréciés. On pourrait aussi citer "Bois épais" d'Amadis, le Choeur des Trembleurs d'Isis, "Qu'une injuste fierté" d'Acis & Galatée, "Quand le péril est agréable" d'Atys, etc... Ces mélodies passèrent dans le patrimoine folklorique français, puisqu'on les retrouve dans les carnets de chant du 19ème siècle, sans qu'il soit nécessaire de mentionner du nom de Lully. Sa popularité fut telle qu'on alla jusqu'à lui attribuer la paternité de la comptine "Au clair de la Lune". Mais cela relève plus de la légende que de la réalité. Il était aussi courant de reprendre ses mélodies dans les églises sous forme de pieux cantiques. En 1687, le peuple, unanime, pleura la perte de ce compositeur de génie:
	Baptiste est mort!
	Adieu la symphonie,
	La musique est finie!
	Déplorons son sort.
Un compositeur élevé dans les plus hautes sphères du pouvoir

Le milieu populaire ne fut pas le seul à être ébranlé par les notes de "Baptiste", comme l'appelait familièrement la France entière. La cour s'enthousiasma véritablement pour ses oeuvres:

"Quand Armide se disposait à frapper Renaud endormi, on voyait tout le monde saisi de frayeur, demeurer immobile, l'âme toute entière dans les oreilles et dans les yeux, jusqu'à ce que l'air de violon qui finit la scène donnât permission de respirer."

Louis XIV, lui-même, eut du mal à se remettre de la disparition de son compositeur fétiche, puisqu'il confia, en 1697, soit dix ans après la mort de Lully, à Destouches, "que depuis Lully aucune musique ne lui avait fait tant de plaisir que la sienne".

Impact d'une musique sur son temps

L'adaptation des airs, que Lully faisait éditer, contribua au dynamisme de l'école instrumentale française. Le claveciniste D'Anglebert, dont les transcriptions furent nombreuses, affirmait: "les ouvrages de cet homme incomparable sont d'un goût fort supérieur à tout autre". De Visée et Gallot, retranscrivirent aussi les oeuvres de Lully pour la guitare et le luth. Un recueil de transcriptions pour orgue est attribué à Geoffroy.

Le succès de Lully fut tel que beaucoup de musiciens français contemporains et postérieurs souffrirent des incessantes et inévitables comparaisons avec celui-ci. Ainsi, Charpentier, qui aurait pu créer de nombreuses tragédies après la mort de Lully, n'en fit qu'une: Médée en 1694, après un premier opéra plus italianisant David et Jonathas. Le public accueillit très froidement cette oeuvre, qui pourtant était proche de la grande tragédie lullyenne. L'acte V de cette Médée est très un hommage au célèbre air "Alceste est morte".

Bon nombre de musiciens français suivirent la voie tracée par Lully :
- Dans la forme de l'opéra français fixée dès Cadmus et Hermione : Marin Marais (Alcyone), Charpentier (Médée), Destouches (Télémaque), Matho (Arion), Royer (Pyrrhus), Montéclair (Jephté)
- Dans la conception du récitatif : De Lalande, Rameau, Campra

Une influence au delà du XVIIème siècle

Tous les esprits s'accordent à reconnaître qu'il existe dans le monde de la musique un "avant Lully" et un "après Lully" dans l'histoire de la musique. En même temps, cette suprématie déchaîna les passions, notamment au 18ème siècle avec la querelle des Bouffons.

Rameau eut des démêlés avec les lullystes, lorsqu'il créa ses opéras Hippolythe et Aricie et Les Indes galantes. Il fut pourtant l'un des premiers à prouver son admiration pour le compositeur de Louis XIV. Non seulement son oeuvre est imprégnée de l'ambiance lullyenne, mais Rameau a aussi cherché à théoriser la musique française qu'avait intitiée Lully.

Rameau

"Lorsque Jean-Jacques Rousseau voulut prouver que le récitatif de Lulli ne valait rien, on vit Rameau repousser ses attaques avec chaleur et prendre en main la défense du créateur de notre opéra. Il vengeait l'homme célèbre qui pouvait seul lui disputer encore l'empire de la scène lyrique et dont il se reconnaissait le disciple : tant les grandes âmes sont au-dessus de l'envie! L'amour de la vérité l'emportait chez lui sur les conseils de l'amour-propre et sur son intérêt particulier. On a remarqué de tous temps que les hommes de génie sont aussi modestes que les ignorants sont orgueilleux. Rameau défendant Lulli offrait sans doute un spectacle intéressant aux yeux des Philosophes et des Artistes ; c'était Rubens couvrant Vandick de sa palette et le garantissant des traits de ses ennemis, ou c'était Cicéron qui n'eût pas souffert qu'on déprimât Hortensius."
Decroix - L'ami des Arts

Les opéras de Lully restèrent à l'affiche tout au long des 17ème et 18ème siècles. Ainsi, Thésée fut joué jusqu'en 1779. Persée fut donné lors de l'inauguration de l'opéra de Versailles à l'occasion du mariage du futur Louis XVI avec Marie-Antoinette. La révolution française sanctionna le dévouement de Lully à la couronne de France. Ses opéras ne furent quasiment plus joués jusqu'au 20ème siècle.


Sommaire