LE GRAND DIVERTISSEMENT ROYAL

Le 18 juillet 1668

La fête de 1668 fut officiellement donnée pour célébrer la paix d'Aix-la-Chapelle et l'annexion des Flandres, officieusement, en l'honneur de Madame de Montespan, l'autre conquête de Louis XIV. Cette grande fête ne dura qu'une seule journée, mais son programme fut intense.


Collation donnée dans le petit Parc de Versailles.

18h00 : Leurs Majestés firent une promenade dans les jardins. A l'emplacement de l'actuel Bosquet de l'Etoile, cinq tables en forme de buffets enouraient le jet d'eau central. Les cinq allées aboutissant au centre étaient décorées d'orangers du Portugal, de cerisiers, d'abricots, de pêchers, de groseillers de Hollande et de poiriers. Les statues du dieu Pan et de quatre Satyres occupaient des niches de verdure. Lorsque le Roi et sa famille eurent fini de se restaurer, la cour pilla littéralement le buffet, ne laissant que désolation derrière elle.

Le Roi se rendit alors avoir la comédie-ballet "Georges Dandin" assortie d'un grand final célébrant les Fêtes de l'Amour et de Bacchus. Pour les besoins de cette représentation, Vigarani dressa une scène monumentale, sur laquelle évoluaient plus de 100 danseurs, à l'emplacement du futur Bassin de Saturne. Le théâtre en bois était orné de tapisseries et éclairé de 32 chandeliers de cristal. Le public était constitué de 1200 personnes assises sur les gradins et 300 autres placées sur le parterre. Les ambassadeurs présents se plaignirent de l'abondance de la foule. Huygens écrit:
"Il y avait une si grande foule de gens qu'à la comédie, le Roy même eut de la peine à faire placer les dames et il fallut faire sortir pour cela quantité d'hommes".

"Lorsque Leurs Majestés furent arrivées dans ce lieu dont la grandeur et la magnificence surprirent toute la cour, et quand Elles eurent pris leur place sur le haut dais qui était au milieu du parterre, on leva la toile qui cachait la décoration du théâtre. Et alors, les yeux se trouvant tout à fait trompés, l'on crut voir effectivement un jardin d'une beauté extraordinaire."


George Dandin,
comédie en musique représentée dans le petit Parc de Versailles.

La comédie plût énormément puisque selon Félibien :
"On peut dire que dans cet ouvrage le sieur Lully a trouvé le secret de satisfaire et de charmer tout le monde ; car jamais il n'y a rien eu de si beau ni de mieux inventé."

Le souper préparé par le premier maître d'hôtel, le maréchal de Bellefonds, fut servi au roi et quelques dames à l'ombre d'un édifice construit par Gissey. L'ouvrage avait une forme octogonale et recouvert de feuillages à l'extérieur. Les pilastres soutenaient un grand dôme, rappelant ainsi les temples grecs. Le milieu du salon était décoré par une belle statue de Pégase. Le rocher sur lequel le cheval ailé se cabrait vomissait de l'eau écumante à divers endroits. Les autres convives purent se restaurer sous des tentes ou aux buffets disposés dans le parc. Une table fut dressée pour les Ambassadeurs dans la Grotte de Thétys.

Un peu plus loin, se trouvait la salle de bal construite par Le Vau. Les six arcades dont était percé l'édifice contenaient des gradins en amphithéâtre. Dans un côté de la salle, une grotte de rocaille abritait une statue d'Arion muni de sa lyre et chevauchant un dauphin. Deux tritons l'accompagnaient. Une autre grotte représentait Orphée en compagnie de deux nymphes. Les autres cavernes montraient des monstres crachant de l'eau.


Salle du bal donné dans le petit Parc de Versailles.

Les illuminations et les feux d'artifice, présidés par Colbert, embrasèrent sans crier gare les allées et les bassins du petit parc au point de semer la panique parmi l'assistance!
"Cette surprise causa un agréable désordre parmi tout le monde qui, ne sachant où se retirer, se cachait dans l'épaisseur des bocages et se jetait contre terre."
Lors de l'apothéose tirée depuis la tour de la pompe, les derniers feux dessinèrent le chiffre de Louis XIV (les deux L entrelacés).


Illuminations du Palais et des Jardins de Versailles.

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